Portrait de chercheur : Fin de mandat de Jean-Jacques Braun comme Réprésentant à l’IRD

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Jean-Jacques Braun est Directeur de Recherche à l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD). Basé à Yaoundé, il est Représentant délégué de l’IRD pour le Cameroun, le Congo, le Gabon et la République Démocratique du Congo depuis 2017. Convaincu de l’importance de l’Afrique centrale dans le domaine de la recherche scientifique, il avait déjà effectué un premier séjour dans le pays entre 1993 et 1999. Sa première rencontre avec le Cameroun date de 1988, lors d’une mission effectuée dans le cadre de sa thèse de doctorat qui portait sur les sols latéritiques du Sud Cameroun.

Pouvez-vous nous présenter votre parcours avant de devenir Représentant de l’IRD à Yaoundé ?

Lors de mon premier séjour camerounais, entre 1993 et 1999, j’ai établi un petit bassin versant expérimental appartenant au bassin du fleuve Nyong dans le Sud Cameroun. Ce petit bassin, d’environ 1 km2, fait partie intégrante d’un réseau de bassins imbriqués allant jusqu’à 10000 km2 sur lesquels sont suivis la pluviométrie, le débit et la chimie des rivières et l’occupation et l’usage des sols. Cet observatoire est suivi depuis plus de vingt ans. Il est reconnu nationalement comme service national d’observation par l’Institut des Sciences de l’Univers (CNRS) et internationalement car il est intégré au réseau mondial d’observatoires de l’environnement dédiés à l’étude des changements globaux. L’observatoire du Nyong est toujours opérationnel de nos jours. Il est suivi en partenariat avec l’Université de Yaoundé 1 et le Centre de Recherche en Hydrologie. Ce réseau, unique en milieu tropical humide, prend d’ailleurs tout son sens à l’heure du réchauffement climatique. Une mission est envoyée toutes les deux semaines sur la rivière pour l’étudier. C’est la seule structure au niveau national qui permet un suivi régulier du débit des rivières et de la variation du régime des pluies.

Après avoir quitté le Cameroun en 1999, j’ai été affecté par l’IRD à l’Indian Institute of Science à Bangalore, le plus prestigieux institut de recherche du sous-continent indien. J’ai séjourné en Inde de 2001 à 2013, avec une courte pause en France en 2009. A l’IISc, j’ai dirigé la Cellule Franco-Indienne en Science de l’Eau, la CEFIRSE, qui est devenue par la suite un Laboratoire Mixte International (IISc-IRD) , l’un des outils du partenariat de l’IRD avec les Jeunes Equipes Associées à l’IRD (JEAI) et les Groupements de Recherche Internationaux (GDRI).
Puis, en 2014, j’ai été réaffecté à Yaoundé comme co-directeur du Progamme Plurisdisciplinaire Régional « Forêt Tropicale Humide » (PPR-FTH) avec Dr. Honoré Tabuna, (maintenant Commissaire à l’Environnement à la Communauté Economique des Etats d’Afrique Centrale, CEEAC) pour structurer les activités en environnement-société dans la sous-région.

J’ai été nommé Représentant délégué de l’IRD en 2017. Même si mon mandat en tant que Représentant touche à sa fin, je vais poursuivre mes activités à l’IRD à Yaoundé en tant que chercheur au Cameroun jusqu’en 2022.

Quel bilan tirez-vous de votre mandat de Représentant ?

Un de mes objectifs principaux en tant que Représentant était la création de groupes de recherche ayant une visibilité internationale, alors que l’Afrique centrale reste à mon sens une zone sous-étudiée mais à fort potentiel.

En ce sens, j’ai monté le laboratoire mixte international « dynamique des écosystèmes forestiers d’Afrique centrale en contexte de changements globaux » LMI DYCOFAC que je dirige avec le Professeur Bonaventure Sonké (Université de Yaoundé 1). Ce laboratoire interdisciplinaire est composé de scientifiques camerounais, gabonais, français, britanniques et belges. Il a été créé pour développer des recherches sur la thématique « zone critique et ressource en eau » en Afrique centrale. Le LMI a pour objectif principal l’étude des liens existant entre évolutions du climat et occupation des sols au travers de la dynamique du couvert végétal et des cycles biogéochimiques. Ce qui fait du laboratoire mixte international DYCOFAC un succès pour moi, c’est la structuration autour des équipes locales. Nous agissons dans une démarche de partenariat équitable avec les pays d’Afrique centrale et œuvrons conjointement pour une science de la durabilité.

Je travaille actuellement au montage d’un projet qui sera soumis fin août au Belmont Forum, partenariat international qui mobilise le financement de la recherche sur les changements environnementaux et en accélère la réalisation afin d’éliminer les principaux obstacles à la durabilité. Nous souhaitons travailler sur deux socio-écosystèmes d’un intérêt majeurs pour le stockage de carbone et les émissions de gaz à effet de serre : le bassin du fleuve Ogooué au Gabon et les basses plaines de Sibérie Occidentale. Le consortium pour ce projet est constitué de chercheurs français, américains et russes. L’objectif général du projet est de rassembler une communauté élargie d’acteurs universitaires et non-universitaires pour co-construire un véritable cadre transdisciplinaire opérationnel et une vision stratégique partagée sur les impacts du changement climatique et de l’utilisation des terres sur le cycle du carbone et la durabilité des sols, des eaux de surface et des eaux souterraines. Cette co-construction s’établira sur la base d’activités de recherche et d’innovation menées à l’échelle locale et régionale. Plus spécifiquement, l’un des objectifs est l’implication les différents acteurs pour l’élaboration d’un jeu de rôles qui intégrera la vision des différentes parties prenantes et les connaissances nouvellement acquises, ceci afin de faire des projections à 50-100 ans. Nous espérons vivement que ce projet ambitieux soit retenu.

Enfin, pouvez-vous nous en dire plus sur les partenariats entre l’IRD et la jeunesse camerounaise ?

Nous avons de nombreux partenariats avec les universités camerounaises notamment. On peut citer la création de l’observatoire socio-environnemental de Douala dans le cadre du projet « Douala Villes Durable » avec la Communauté Urbaine de Douala et l’Université de Douala financé par l’Agence Française de Développement / Fond Français pour l’Environnement Mondial (AFD/FFEM).

On peut également citer le Master ressources en eau et risques environnementaux dans les métropoles africaines (MAREMA) qui est le fruit d’une collaboration entre cinq universités africaines et plusieurs partenaires européens dont l’IRD. Il a été construit à partir de l’analyse des besoins du marché du travail et de la recherche scientifique. Nous participons aussi au Master Gestion intégrée des environnements littoraux et marins (GIELM) en partenariat avec des universités gabonaises et camerounaises. Il répond aux besoins de former des cadres et des scientifiques de haut niveau à la gestion durable des espaces littoraux et marins.

Dernière modification : 20/08/2020

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